On
le croit breton ou anglais, mais il est fils du soleil…
Né à Oran, en Algérie, le 14 janvier 1956, Etienne
Daho reste aujourd'hui le plus international de nos artistes français.
Si son cœur est au Sud (il aimerait vivre à Séville
plutôt qu'à Londres), sa musique est au Nord (anglo saxonne
avant tout). Timide et discret, Daho est non seulement l'interprète
de nombreux tubes (Week end à Rome, Duel au soleil, Tombé
pour la France,…), mais aussi l'instigateur et le producteur
de nombreux autres artistes (des Valentins à Brigitte
Fontaine dont il a relancé la carrière avec Genre
humain). Tantôt confident (avec Françoise Hardy
ou Lio), tantôt ami (avec Elli Medeiros ou Arnold
Turboust), ou encore mentor (avec Edith des Valentins), Etienne appartient
à une catégorie d'hommes généreux et talentueux
que le temps et l'espace n'effraient pas. Car il est aujourd'hui un des
chanteurs français les plus appréciés de sa génération,
et dont le talent a franchi les frontières de l'hexagone.
Entre
rires et larmes
Fils
de militaire, Etienne Daho naît et grandit dans une Algérie
française en pleine guerre. Les moments de bonheur alternent avec
l'horreur au quotidien. Rentrant de l'école avec ses sœurs,
il est parfois obligé dans la rue d'enjamber des cadavres. En 1965,
la famille Daho rejoint la France, tout d'abord à Reims, chez une
tante d'Etienne, puis à Rennes, en Bretagne, où il passera
le reste de sa jeunesse. Ses premiers contacts avec la musique sont précoces.
Enfant, il danse devant le juke box de l'épicerie de ses grands-parents
pour amuser la galerie, mais la révélation a lieu à
Paris, à l'Olympia, lorsque ses parents l'emmènent voir
un concert de Petula Clark. Etienne a huit ans et tombe sous le
charme de la chanteuse. Coïncidence ? Petula est le parfait exemple
du mélange des genres franco-anglais (à l'image d'une Birkin).
A l'adolescence, il n'échappe pas à la déferlante
Beatles et Stones, ainsi qu'au Pink Floyd et au Velvet Underground de
Lou Reed, tout en restant attaché à la chanson française
et au jazz qu'écoutent ses parents. Il forge ainsi, dès
son plus jeune âge, la double influence que l'on retrouvera dans
son œuvre bigarrée.
Transmusicales
et premières mélodies
A
dix-sept ans, Etienne devient père, mais devant une situation
personnelle instable, il décide de ne pas élever cet enfant qu'il
confie intégralement à sa mère. Il ne révèlera son existence qu'en
2014, en avouant ne jamais avoir renoué contact avec lui. Après des
études d'anglais (comme par hasard…) à Rennes, Etienne fait la
connaissance en 1976 d'Hervé Bordier. Cet ami, féru de musique et à
l'affût de toutes les nouveautés, crée les Transmusicales de Rennes et
inaugure le festival avec Higelin. Il présente
aussi à Etienne Philippe Pascal et Franck Darcel (Marquis de
Sade), qui encourageront le jeune homme à se lancer dans la
chanson. En cette année 1978, Etienne s'investit plus dans la musique
que dans le travail. Il fonde une association Ellipse afin de marcher
sur les traces de son ami Hervé. Loin de réussir le pari
des Transmusicales, Daho
parvient cependant à organiser un concert exceptionnel des Stinky
Toys (le groupe de Jacno et d'Elli Medeiros) et des Marquis de Sade le
20 décembre 1978. Le concert est un non-événement,
mais la rencontre avec Elli est magique. Etienne en tombe immédiatement
amoureux avant que ne prenne place une amitié sincère et
durable. La jeune femme encourage Daho à chanter, et après
une première expérience sur scène aux deuxièmes
Transmusicales, il enregistre quelques maquettes qu'il distribue autour
de lui (sous le nom de Daho Junior). Sa carrière naissante se concrétise
en 1980 avec la rencontre d'Arnold Turboust, auteur, compositeur et musicien
de talent (on le connaît pour son succès Adélaïde).
Le travail commun des deux amis aboutit à la sortie d'un premier
album Mythomane en 1981.
Paris
Etienne
s'installe à Paris pour répondre au succès médiatique
de son premier disque. Mais c'est à Rennes qu'il enregistre le
très beau 45 tours, Le grand sommeil. Ce titre sort en décembre
1982 et obtient un certain succès qui permet au couple Daho-Turboust
de peaufiner le deuxième album d'Etienne, La notte la notte,
qui sortira en 1984, avec une magnifique pochette de Pierre et Gilles.
L'extrait de ce disque Week end à Rome est un véritable
tube. Il fait rentrer définitivement Daho dans le monde de la chanson
tout en le cantonant à un style pop-naïf dont il aura du mal
à se défaire. Tomber pour la France confirme son
talent et offre au chanteur le Bus d'Acier 1985. Etienne est désormais
un artiste reconnu et son nouvel album, Pop Satori, sorti en 1986,
ne déçoit pas. C'est un disque nouveau et riche, aux mélodies
entraînantes et aux textes sensibles. Epaule Tatoo passe
sur toutes les ondes et fait de Daho le chef de file de la pop française.
Cinéma
Parrallèlement,
il s'essaie au cinéma dans deux films de Olivier Assayas
(Désordres amoureux) et de Virginie Thévenet
(Jeux d'artifice). Cette expérience lui permet surtout
de ne pas tomber dans le piège du succès . "
J'étais devenu de la chair à médias "
avoura-t-il, se rappelant cette période faste. En effet,
sa maison de disque use et abuse de vidéos, compilations,
inédits, photos en tout genre. Etienne préfère
s'éloigner afin de conserver son identité et son
honnêteté. Laissant de côté le métier
d'interprète, il se lance dans la production d'autres artistes,
à commencer par son complice et ami Arnold Turboust.
Un trio de jeunes gens l'aborde dans une boîte de nuit,
après une soirée un peu arrosée. Ce groupe,
Les Max valentins, se compose notamment d'Edith Fambuena et d'un
certain Gérald
De Palmas. La première conserve de cette rencontre
un succès médiatique (le groupe, séparé
de De Palmas devient les Valentins) et une solide amitié
avec Etienne. Le second, lancé avec l'aide de Daho, deviendra
l'artiste de talent que l'on connaît aujourd'hui.
Londres
Emigré
à Londres où il s'imprègne des derniers courants
musicaux en vogue, notre " rennais " prépare et enregistre
un album très anglo-saxon : Pour nos vies martiennes, qui
sort en juin 88 et se fait remarquer par le tube Bleu comme toi.
La tournée qui s'en suit culmine au Zénith de Paris avec
l'enregistrement d'un album live. Décidément cosmopolitain,
Daho part pour New York où, avec la complicité d'Edith,
il enregistre Paris Ailleurs qui sortira en 1991. Cet album marque
un tournant dans la carrière musicale d'Etienne. Plus mûr,
composé presque exclusivement par son interprète, il livre
un opus intelligent et nouveau, qui cherche à bannir l'image de
séducteur timide qui lui colle à la peau. Mais rien ne fera
rester en place cet éternel voyageur. A peine sorti de la promotion
de Paris ailleurs, il s'investit à fond dans une autre aventure
: Urgence , association caritative au profit des victimes du SIDA,
permet, avec la collaboration des Bruel,
Sheller,
Aubert, Goldman,…
d'enregistrer le premier disque destiné à lutter en France
contre ce terrible fléau. Mais alors que sa volonté de rester
en dehors des feux de la rampe le pousse à retrouver sa ville d'adoption
Londres, Etienne est victime d'une rumeur. Absent des médias, on
le dit mort du SIDA (Isabelle Adjani sera, plus tard, victime de la même
rumeur). Bien vivant Daho sort le disque St Etienne Daho fin 1995.
Il est un album hybride, fruit de la collaboration du groupe anglais St
Etienne et de l'artiste français.
Collaborations
Malgré
de nombreuses participations à d'autres albums (en tant qu'auteur
ou en tant que producteur : Brigitte
Fontaine, Guesch Patti, Elli et Jacno, Turboust, Dutronc,…)
Daho trouve encore le temps et l'énergie de composer Eden,
qui sort fin 96, l'année de ses quarante ans. Cet album, très influencé
par la mode trip-hop jungle, déçoit un peu. Il prouve cependant que le
chanteur ne se satisfait jamais de sons prédéfinis, et qu'il sait se
remettre en cause sans tomber dans la routine et l'ennui. Toujours aux
avants postes de la modernité, il inaugure son site Internet en 1997.
Il est avant tout un homme de l'universalité, mais se garde bien d'être
une star à l'américaine. Pour preuve ce spectacle étonnant qu'il livre
la même année sur scène à partir de l'ouvre de Jean Genêt Le condamné à mort. Ses vingt ans de carrière permettent la sortie d'une compilation de
ses plus grands tubes, un coffret de vingt titres, la parution d'une
version
anglaise de Au commencement,… Nombreux sont alors les artistes
français
ou anglais qui reconnaissent en lui un des piliers de la chanson francophone
contemporaine. Entre Londres et Paris, il continue ses collaborations artistiques, notamment avec Vanessa Paradis, Dani ou Jane Birkin.
Ses albums remportent systématiquement un grand succès public et sont
régulièrement récompensés (Victoires de la Musique). Chacun de ses
albums est suivi d'une tournée et parfois d'un album "live". Il est
même décoré en 2006 et reçoit le titre d'Officier des Arts et des
Lettres.
Quand Daho devient mythe.
La sortie de Les chansons de l'innocence retrouvée
en 2013 a un retentissement international. D'aucuns le considère comme
son meilleur album, enregistré par ailleurs aux studions londoniens
d'Abbey Road. Une soirée complète lui est consacrée sur Arte en 2015.
Avec Blitz, les récompenses continuent de tomber et les Victoires de la
Musique lui dédient une récompense pour l'ensemble de sa carrière en
2018. Son dernier album en date, Tirer la nuit sur les étoiles n'échappe pas à la règle de Daho : succès, concerts, presse.
De Dutronc
à Fontaine,
de Lio à Chris Isaak, de Birkin à Vartan,
Etienne Daho s'est installé discrètement au sommet de son art. Généreux,
comme lorsqu'il chante pour Urgence ou les Enfoirés, partenaire
idéal comme durant l'année 2001 avec Dani (égérie
des années 60 dont il relance la carrière), il est
sans conteste un homme de talent, internationalement reconnu (et vénéré) dont chaque album révèle
des trésors de musicalité et d'ingéniosité.
SB 2003-2023
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BIO EXPRESS
Né
à Oran, Algérie, le 14 janvier 1956. La famille quitte l'Algérie en
1965 et rejoint la France, à Reims puis à rennes. Découvre la musique
et ses influences sont avant-tou anglo-saxonnes. Etudes d'anglais à
Rennes. Plusieurs rencontres importantes en 1978, fonde l'association
Ellipse et organise deux concerts des Stinky Toys et Marquis de
Sade. Enregistre quelques maquettes. Rencontre avec Arnold Turboust en
1980. Sortie de Mythomane en 1981. Part pour Paris et enregistre le
Grand sommeil puis le deuxième album La notte la notte en 1984.
Enchaîne les succès et reçoit le Bus d'acier en 1985. S'essaye au
cinéma. S'installe à Londres. S'investit dans Urgence, lutte contre le
SIDA. Eden fin 1996. Multiplie les collaborations. Sorties de nombreux
albums toujours reçu avec succès, tournées. Reçoit le titre d'Officier
des Arts et des Lettres en 2006. Plusieurs Victoires de la musique dont
une pour l'ensemble de sa carrière en 2018. Tirer sur les étoiles,
dernier album en date en 2023.
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Pour La notte la notte.
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