Souchon est sur le petit dictionnaire intime de la chanson française par SeB

Alain Souchon L'antistar, entre tendresse et rêverie 1944-...

Casablanca-Paris Aller simple.

Alain Souchon, de son vrai nom Alain Kienast, naît à Casablanca au Maroc, le 27 mai 1944. Il porte officielllement le nom de Kienast qui est le mari de sa mère, mais son père biologique est l'amant de celle-ci, un certain Pierre Souchon, professeur d'anglais. La famille "Souchon" (nommons-la Souchon plutôt que Kienast pour plus de commodité) quitte très vite le Maroc pour Paris. Très tôt, le petit Alain est un enfant rêveur et doux. A l'école, il ne travaille guère. S'il grandit à Paris, avec son grand frère (trois demi-frères et soeurs suivront), c'est à la campagne qu'il rêve et à la grande maison de l'oncle Gaston. Mais à sept ans, la famille explose. Alain part vivre avec sa mère et cet homme qu'on lui dit être son vrai père. Il laisse derrière lui ses frères et soeurs, mais surtout une blessure d'enfant qui ne guérira jamais. Puis un nouveau drame en 1959, sur la route des vacances. Un accident de voiture tue Pierre, et le jeune Alain se retrouve brusquement orphelin, désorienté.

Un monde de femmes.

Sa grand-mère vient s'installer chez eux, et elle éveille Alain à la musique par le biais de la radio qu'elle écoute sans cesse. On y joue les grands artistes anglo-saxons des années soixante (le rock débarque en France) : Bee Gees, Beatles, Paul Anka,... mais aussi les grands poètes français : Ferrat, Brassens, Ferré et surtout Brel qui marquera profondément Alain. On retrouvera plus tard dans l'oeuvre de Souchon ce mélange émouvant de mélodies dansantes et rythmées, et de textes intelligents et mélancoliques. Pour survivre, la mère de Souchon écrit des romans de gare.

De Paris à Londres, et de Londres à Paris.

Devant une scolarité en dents de scie, elle envoie Alain dans un lycée "disciplinaire" en Haute Savoie. Isolé et meurtri, il y apprend l'écriture comme échappatoire, l'écriture et la lecture des poètes français. Mais ses résultats ne suivent pas et il se fait exclure. Destination Londres, dans un lycée français qu'il n'intégrera finalement pas, pour défaut d'inscription. Au lieu de ça, Alain trouve un job de serveur et s'installe en Angleterre. On imagine l'extrardinaire aventure de ce jeune homme introverti qui découvre une des capitales les plus en vue de l'époque, s'y fait des amis, écrit ses premières chansons pour eux et trouve, en quelque sorte, sa voie. Un an et demi plus tard, il revient en France, des idées de disques plein la tête et fait la tournée des maisons de disques et des cabarets. Mais c'est insuffisant, et comme il faut bien vivre, il effectue les premiers boulots qui viennent.

Un début de succès.

Mai 68 passe, Souchon n'y prête guère attention. Il continue son petit bonhomme de chemin, un peu à contre-courant de ce qui se fait alors. En 1969, il rencontre Françoise dite Belote, et l'épouse en 1970. Elle l'encourage, lui, le garçon mal dans sa peau et pessimiste, elle le pousse à perséverer. Grâce à son soutien, Alain continue à écrire ses chansons tout en vivotant, jusqu'à ce qu'il décroche en 1971 son premier contrat avec l'enregistrement de Je suis un voyageur et Un coin de solitude. Les deux titres passent cependant inaperçus. Belote travaille pour faire vivre la famille qui s'agrandit la même année avec l'arrivée de leur premier enfant Pierre (en octobre 1972). Cette naissance pousse Souchon à se réveiller, à presque trente ans. Il écrit L'Amour 1830, initialement prévu pour Frédéric François, mais qu'Alain chantera lui-même. C'est son premier succès qui lui vaut le Prix de la Critique et le Prix Spécial au concours de la Rose d'Or d'Antibes en 1973.
Encouragé par ce premier succès, Souchon s'associe à un artiste débutant, comme lui, un certain Laurent Voulzy ! Leur première collaboration donne J'ai dix ans qui est un tube. Nous sommes en 1974, et la carrière de Souchon (et celle de Voulzy) démarre enfin. Suivent Bidon et Jamais content. Ces quelques titres suffisent à asseoir la réputation de Souchon. Le scènes deviennent plus importantes aussi : l'Elysée Montmartre dès 1975, puis l'Olympia.
Le succès de Souchon allant de pair avec celui de Voulzy, et devant l'amitié naissant entre les deux hommes, Alain et Laurent ne se quittent plus et prennent dès lors l'habitude de travailler ensemble : isolement en Bretagne ou sur la côte méditéranéenne pour écrire et enregistrer, puis tournée, parfois ensemble sur scène.

Avec ses fils Charles (Ours) et Pierre.

1978 Un pas vers le cinéma.

En 1978 naît Charles, son second fils (qui deviendra le chanteur Ours) et Alain se voit proposer une collaboration avec le cinéma. Il écrit une chanson pour le film de Truffaut L'amour en fuite. En 1980, tout en continuant l'écriture, notamment avec Jonasz pour la sortie de Rame, ou Chédid, il tente sa première véritable expérience au cinéma dans Je vous aime de Berri. Suivront de nombreuses autres collaborations, sans que Souchon ne franchisse réellement le pas vers le septième art (il se trouve peu doué pour la comédie). Tranquillement, il écrit ses albums (et ceux de Voulzy avec sa collaboration) puis parcourt la France en tournées. Les albums C'est comme vous voulez (1985) et surtout Ultra moderne solitude (1988) marquent définitivement le paysage musical francophone avec des tubes comme La ballade de Jim ou Quand j'serai KO. La notoriété du chanteur timide n'est plus à faire. Il sait aussi partager comme en 1993 ou en 1995, lorsqu'il s'engage auprès de Cabrel, Zazie, Maurane ou Jonasz, Le Forestier, dans l'aventure Sol En Si (au profit des enfants malades du SIDA), ou avec les Enfoirés pour les Restos du coeur. Loin de lasser le public, Souchon est intarissable et ses albums des années 90 des pépites de poésie et de musicalité : C'est déjà ça (avec Foule sentimentale), puis Au ras des paquerettes (1999). Le chanteur accumule les récompenses (plusieurs Victoires de la Musique) et les chiffres des ventes affolent les compteurs. Sur scène, il se révèle à la fois tendre et drôle, cynique ou naïf, et la "foule" est fidèle et nombreuse à chaque concert.

Une tranquille et discrète notoriété.

Loin d'être lassés par leur longue et solide amitié, Voulzy et Souchon décident enfin, en 2014, de sortir un album ensemble, composé de duos. Sur scène, les deux comparses s'en donnent à coeur joie et ravissent le public qui retrouve ensemble deux valeurs sûres de la chanson. Puis les disques s'enchaînent, entrecoupés de concerts, de récompenses et d'écriture. L'octogénaire Alain Souchon, éternel jeune homme rêveur et timide, après de millions d'exemplaires de ses disques vendus, et de centaines de concerts, continue, tranquillement, à séduire par sa discrétion et sa gentillesse, ponctuant sa carrière de petits bijoux de tendresse écrits avec son ami Voulzy, ou encore avec leurs enfants, Charles Souchon, Pierre Souchon et Julien Voulzy (qui furent liés un temps dans le groupe Les Cherche Midi). Un bel exemple de fidélité et d'humilité pour un artiste à part.

SB 2003-2023

BIO EXPRESS

Né Alain Edouard Kienast à Casablanca (Maroc) le 27 mai 1944. Part vivre à Paris très jeune. Découvre la véritable identité de son père à sept ans. Ce dernier meurt dans un accident lorsqu'Alain a quatorze ans. Scolarité moyenne. Est envoyé dans un établissement privé en pension. Découvre l'Angleterre et écrit ses premières chansons. Rencontre Françoise en 1969 et l'épouse l'année suivante. Premier 45T en 1971. Naissance de Pierre en 1972. Premiers succès en 1973. Rencontre Laurent Voulzy et se lie d'amitié pour lui. Devient un chanteur connu avec J'ai dix ans et Bidon. naissance de Charles en 1978. Débute au cinéma. Les albums se succèdent avec un succès croissant, tournées, enregistrements, écriture. Participe aux Enfoirés, à Sol en Si et d'autres oeuvres caritatives. Remporte plusieurs Victoires de la Musique.