Né Claude Moine le 3 juillet 1942 dans le 9ème arrondissement de Paris, Eddy Mitchell reste l'un des meilleurs représentants des enfants du Rock. Tout comme ses copains de la bande de la Trinité (Johnny Hallyday et Jacques Dutronc), les jeunes hommes ont subi de plein fouet la vague déferlante Rock'n'roll des années 50. Presley, Chuck Berry, Jerry Lee Lewis, Budy Holly, Carl Perkins, ou Gene Vincent furent les pères spirituels de celui que l'on surnommera plus tard Schmoll et qui, après quarante ans de carrière, reste pourtant un des piliers de la chanson francophone.

Un père mécanicien à la RATP, une mère employée de banque, un grand frère (Pierre) et une grande soeur (Gisèle) de sept et neuf ans de plus que lui, le petit Claude grandit dans un environnement populaire. Mais le jeune parisien tourne très vite ses yeux vers les Etats-Unis en partageant avec son père ses premières amours pour le Western. Un univers qu'il n'abandonnera jamais et pour lequel il entamera, des années plus tard, une carrière de présentateur télé (La Dernière Séance sur France 3) puis de comédien (voir filmographie ci-dessous). Pour l'heure, le jeune Claude n'est pas un fan d'école et à quatorze ans, il plaque le lycée pour devenir coursier au Crédit Lyonnais. Mais sa véritable passion, outre le cinéma, c'est le Rock de Gene Vincent et de Bill Haley. Avec ses copains, il traîne au Golf Drouot, une salle de concert très à la mode.

Avec Les chaussettes noires de 1961 à 1964.

Il fonde un premier groupe, les Five Rocks, puis change de nom : Claude Moine devient Eddy Mitchell. Les Five Rocks deviennent les Chaussettes Noires. Le succès ne se fait pas attendre grâce au tube Daniela en 1961, la même année que son mariage avec Françoise Lavit. Malgré une interruption due au service militaire, la carrière musicale d'Eddy ne s'arrête pas là. Jusqu'en 1964, le groupe des Chaussettes noires occupe le devant de la scène, vendant des centaines de milliers de disques, puis dès 1963, Eddy commence une carrière solo et enchaîne les albums , enregistrés en Angleterre ou aux Etats-Unis. Mitchell traverse les sixties avec aisance, et résiste, malgré une traversée du désert, aux seventies en restant fidèle au Rock'n'roll. Les tubes s'enchaînent : C'est un Rocker, En crédit et en stéréo, Bye bye Johnny be Good, Sur la route de Memphis, Il ne rentre pas ce soir,... Toutefois, sa musique évolue et ses ballades romantiques sont nombreuses, tout comme des titres qui utilisent des styles musicaux très variés. Même si sa carrière des années 70 est, comme il le chante lui-même, "en dents de scie", il s'impose peu à peu comme une figure indétronable de la chanson française.

C'est à partir de 1976 qu'Eddy revient sur le devant de la scène avec des albums enregistrés à Nashville et des tubes incontournables de son répertoire : Tu peux préparer le café noir, Sur la route de Memphis et surtout La dernière séance, qui parle de sa passion pour le cinéma, puis Couleur menthe à l'eau en 1980. C'est à cette époque qu'il divorce de Françoise, mère de leurs deux enfants Eddy (1962) et Marilyne (1965). Quelques mois plus tard, il se remarie avec Muriel (1980) avec laquelle il aura en 1982 un troisième enfant, Pamela.

Mitchell va consacrer une grande partie des années 80 au cinéma. En tant que présentateur de la Dernière Séance sur France 3 (FR3 à l'époque) mais surtout en tant que comédien. Il tourne avec les plus grands et surprend par son aisance devant la caméra et ses qualités d'acteur. Je vais craquer, Coup de torchon, A mort l'arbitre !, Frankenstein 90, Autour de minuit, puis Promotion canapé, Le bonheur est dans le pré, Tanguy,... les succès sur grand écran sont incontestables et il tourne avec les plus grands réalisateurs (Tavernier, Chatilliez, Mocky) tout comme les plus célèbres comédiens (Baye, Serrault, Lhermitte, Rochefort, Azema, Lanvin, Clavier). Cela ne l'empêche pas d'enregistrer ses plus grands tubes (Le cimetière des éléphants, Nasville ou Belleville, Comme quand j'étais môme,...) Eddy Mitchell réunit plusieurs générations de fans. On pensait que le crooner ne survivrait pas aux années 90 : c'est une erreur. Rio Grande et les tournées gigantesques qui suivent l'abum dès 1993 sont un véritable succès. Le bonheur est dans le pré au cinéma devient un film culte. Le personnage truculent d'Eddy Mitchell ne laisse personne indifférent. Cigare au bec, bon vivant au langage fleuri, le chanteur reste un personnage hors norme, passionné de chanson et de vie et le public continue de lui être fidèle.

S'il annonce en 2010 que sa tournée Ma dernière séance sera la dernière, il n'en reste pas moins présent, offrant de temps en temps quelques concerts ciblés, ou participant en 2014 et 2017 à la tournée des Vieilles canailles avec ses deux comparses Johnny Hallyday et Jacques Dutronc. En 2015 paraît De Belleville à Nashville, l'intégrale de son oeuvre avec 50 CD. Un coffret monumental qui rend compte de l'ampleur du talent d'Eddy et de l'hétérogénéité de ses enregistrements.

Durant la fin des années 2010 et le début des années 2020, il continue d'enregister malgré son âge qui l'oblige à prendre des précautions. Moins de tabac, moins d'alcool, moins d'excès. Le chanteur prend tout ça avec philosophie. Il a même pensé à la fin : "La mort fait partie de la vie. Il faut bien l'accepter. Mais le plus tard possible et dans peu de souffrances, si possible. J'ai même déjà pensé à mon épitaphe : 'Ne pas déranger'. J'aime bien qu'on me foute la paix ** ". C'est finalement ça l'esprit rock n' roll.

SB 2006-2023

** propos tenus lors d'une entrevue avec Télé magazine en décembre 2021.