Dans
le monde de la chanson contemporaine, il y a ceux qui, bénéficiant
des feux de la rampe, commercialisent avec plus ou moins de légitimité
leur art dans tous les médias. Et il y a ceux qui construisent,
parfois seuls, sans strass ni paillettes, un monde éclatant de
musicalité et de poésie. Lulu Borgia fait partie de cette
deuxième catégorie et nous enivre, à la manière
des « exclus » des médias (les Leprest, Reginal, Camille,
Marie Kiss
La Joue, Darnal, Rapsat, Tété, Cherhal, etc…)
en construisant un univers sombre et mélancolique. Coup de projecteur
sur une artiste à part.
Lulu
Borgia est née quelque part entre l’Irlande et le Moyen-Age.
Son monde musical est quasi masculin tant il transporte de puissance et
de tripes. Rien à voir avec une artiste contemporaine. Et pourtant,
elle fait bel et bien partie de notre univers musical. Après un début au Conservatoire où elle apprend le
violon, Lulu grandit et avec elle, sa passion pour le Rock. Exit le violon,
bonjour la guitare, la basse et la batterie. Elle a quinze ans, et en
composant ses premières chansons, elle sait déjà
que la musique est sa vie. Un premier groupe Urgeance avec son ami de
toujours Bruno Giglio (son violoniste actuel) puis une seconde expérience
au sein de Chronique Métropole, groupe avec lequel elle enregistre
un premier 45 tours. Un pied dans l’engrenage artistique.
Lulu
Borgia naît réellement avec la rencontre avec Jean-Pierre
Joblin, auteur de BD et parolier. Leurs univers respectifs sont si proches
que les deux complices ne font plus qu’un. Jean-Pierre à
la plume, Lulu aux partitions. Lulu écument les salles de concerts
et se bat pour s’imposer. Période difficile. Seconde rencontre
déterminante : celle de Jean Favre directeur du Théâtre
du Tourtour. Il l’encourage à persévérer, et
ça marche. Nous sommes en 1995 et Lulu Borgia signe son premier
contrat chez Media 7 (maison de disques de La Tordue notamment). Premier
album aussi, intitulé Luxe bordel et voluptés. Tout un programme
pour une femme hors norme qui refuse d’emprunter les sentiers battus.
A défaut des radios, encore frileuses, le monde de Lulu s’exporte
avant tout par la scène. Une scène qu’elle maîtrise
parfaitement, et sur laquelle ses amis musiciens (Bruno Giglio, Jérôme
et Etienne Gauthier) font des merveilles. On la voit dans les festivals
(comme à Thank you Ferré) ou sur toutes les scènes
européennes (Belgique, France, Allemagne,...). Elle se fait remarquer
en première partie d’Arthur
H, autre trublion de la chanson. Les journaux, curieux et ravis, écrivent
de plus en plus sur ce phénomène et invitent à la
découvrir.
Après
un deuxième album Turbulences et dépressions en 2001 et une nouvelle tournée, la chanteuse a le culot
d’enregistrer aux Déchargeurs un troisième album
live Chair publique
qui sort en janvier 2003. Cet opus, salué par toute la presse
spécialisé (Chorus, FNAC, Télérama, Woxx,...) signe l’envol de
l’artiste que l'on compare à une "Guidoni au féminin" (RFI). Il faut dire que l’ambiance qui s’en dégage est hors du
commun, entre gargouilles et alchimie, le tout dominé par une voix
puissante et saisissante. Elle enregistre courant 2005 un album en
condition "live". Son nom Tohu-Bohu : il sort le 2 février 2006,
et à cette occasion, la chanteuse nous accorde une entrevue exclusive. Elle se produit au mois de juin 2006 à l'Européen à Paris.
Malheureusement,
l'artiste ne parvient pas à dépasser en notoriété une certaine
confidentialité qui la condamne peu ou prou à l'ombre. Malgré quelques
concerts en Province dans les années suivantes, Lulu Borgia sort des
radars et ne fait plus entendre sa voix.
Artiste
unique de la nouvelle scène française, Lulu Borgia a transporté avec elle
un monde à part. Entre rock et poésie, sa musique n’a
pas d’âge, et a su, comme personne, faire chavirer l’oreille
et le cœur.
SB 2006-2023
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