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Retranscription de l'entrevue exclusive que lulu Borgia a accordée au Petit dico intime de la chanson française en 2006.

Le Petit Dico : Bonjour Lulu Borgia et merci d'avoir accepté l'invitation du Petit Dico. Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, pouvez-vous vous raconter en quelques lignes ?

Lulu Borgia : Bonjour Seb, en quelques lignes, oh la la … allez je vais essayer !!. La musique tout d'abord, je suis tombée dedans quand j'étais petite, mon jeu favori était de jouer à la chef d'orchestre avec mes poupées et nounours. Vers 8 ans, j'ai voulu faire de la batterie, mais ce n'était pas pour les filles, alors comme j'étais une enfant docile à cet âge j'ai fait du violon, je ne le regrette pas aujourd'hui car ça m'a permis de développer le sens mélodique. C'est aussi un instrument qu'on doit apprivoiser, l'apprentissage est un long voyage comme la chanson. A l'adolescence j'ai découvert le rock et le plaisir que l'énergie pouvait procurer, j'ai joué dans différentes formations, c'est à cette époque que j'ai rencontré Bruno et Marc Giglio, violoniste et batteur qui jouent aujourd'hui dans le groupe, à cette époque j'étais la bassiste. Mes origines Basques, le goût du chant m'a attirée naturellement vers le micro, à partir de cet instant j'ai su que c'était là qu'était ma place…ça se sent tout de suite, j''étais juste au bon endroit. Dans mon cercle d'amis, il y avait un mec qui dessinait et écrivait tout le temps, c'était Jean Pierre Joblin, on s'est vite aperçu qu'on avait tout un univers en commun. L'aventure a démarré comme une invitation à un bal masqué, on a cherché nos déguisements au début, avec une chanson plus traditionnelle et des thèmes qui partaient tout azimut. Je me suis aperçue très vite que je n'avais pas besoin de me déguiser, j'avais envie de faire des chansons qui étaient en rapport avec mon énergie et ma façon de voir la vie. Une envie de faire des choses simples et là tu t'aperçois que c'est là que ça devient compliqué… Par le hasard du net j'ai rencontré Etienne Gauthier avec qui on a enregistré un premier album Live « Chair publique » . Juste après on a souhaité orienter nos arrangements dans une énergie plus rock, Jérôme Gauthier et Salim Benabdallah ont rejoint le groupe. Depuis l'aventure artistique et humaine habite nos chansons rock.

Le Petit Dico : Que serait Lulu Borgia sans la rencontre avec Jean-Pierre Joblin ? Et de la même façon, que pensez-vous avoir apporté, par la musique, à cet illustrateur d'ouvrages pour la jeunesse ?

Lulu Borgia : Je dirais que cela nous a obligés tous les deux à nous remettre en question et à ne jamais œuvrer dans la facilité. Les mots ont donné un sens au ressenti et la musique a, je pense, bousculé les schémas d'écriture de Jean-Pierre. Si nous continuons à travailler ensemble encore aujourd'hui c'est que nous avons trouvé un équilibre, posé nos poids d'émotions de chaque côté de la balance et avons évolué ensemble et c'est bien.

Le Petit Dico : Parlons de Tohu Bohu : ce qui frappe et envoûte à son écoute, c'est cette formidable énergie, proche de celle de la scène. En l'enregistrant dans les conditions du « live », ne souhaitiez-vous pas finalement donner une continuité artistique à Chair Publique ? D'ailleurs, l'on retrouve La Chanson de Bascoulard ou Un temps médiéval, comme pour faire la transition entre les deux albums.

Lulu Borgia : C'est tout à fait ça !! La scène et le disque sont des choses très différentes. Le disque demande beaucoup de moyens si on veut qu'il sonne comme on le souhaite, on passe du temps sur les arrangements et souvent les détails prennent le pas sur l'essentiel. Personnellement, je suis une fan des disques « live ». Les accidents d'interprétation, le son plus direct de ces disques donnent une dimension humaine et non formatée à l'artiste. Pour Tohu-Bohu, n'ayant pas eu les moyens nécessaires pour faire un album studio et comme la scène était notre terrain de jeu favori, on a voulu faire une photo instantanée de l'année 2005. On a repris deux chansons du précédent album avec des arrangements qui correspondent mieux à notre envie du moment. L'enregistrement s'est fait très vite en trois jours, cela nous a permis de rencontrer Didier Périer de DIP MUSIC, qui a fait les prises de son et le mixage. Etienne Gauthier s'est chargé de faire la post-prod, pour relier toutes les chansons entre elles. J'avais envie de retrouver le voyage qu'on ressent en concert et d'y inviter le public.

Le Petit Dico : Votre univers musical et poétique ne cesse de faire d'étourdissants voyages dans le temps (entre guitares électriques et violons, entre XXIème siècle et Moyen Age). Lulu Borgia serait-elle la fille cachée de François Villon et de Nina Hagen ?

Lulu Borgia : Deux artistes libres, c'est peut-être ça le point commun

Le Petit Dico : Quel travail faites-vous ou avez-vous fait sur votre voix, que l'on sent solide, forte et si fragile à la fois, prête parfois à basculer, à chavirer, à s'effondrer volontairement dans l'émotion ?

Lulu Borgia : Au départ, comme je le disais plus haut, j'ai mis des masques, je théâtralisais trop ma voix, quand j'ai voulu me mettre en prise directe avec moi même et le public, j'ai du virer tous les artifices. J'ai dû trouver… ma voix. Forcement ensuite, la voix est le reflet et l'instrument de ta sensibilité alors oui je suis quelqu'un fort et sensible à la fois, mais tu sais, si tu regardes autour de toi beaucoup de gens ont cette dualité !!

Le Petit Dico : Quel rapport entretiens-tu à la lecture et à l'écriture ? Quelles furent tes premières amours littéraires ?

Lulu Borgia : Quand j'étais gosse, j'étais complètement accro à Jules Verne, il me donnait l'envie de partir plus loin, toujours plus loin. Le rêve se transformait en réalité, l'hypothèse en « ça s'peut ». Ensuite ado, j'ai commencé à regarder le monde dans lequel je vivais et bizarrement j'ai plongé dans Zola. Cela faisait écho en moi. L'amour de la musicalité des mots m'est venue avec les poètes du 19 ième Baudelaire, Rimbaud, Nerval et quelques chanteurs comme Férré, Barbara, Jim Morisson…. Aujourd'hui ce qui me plait le plus ce sont les biographies, j'adore les parcours humains. Je ne suis pas quelqu'un qui lit beaucoup. Je ne sais pas si c'est de la fainéantise, mais je trouve plus mon compte au cinéma, j'y vais le plus possible et je pourrai en parler des heures !!

Le Petit Dico : Quel rapport as-tu avec les autres artistes de la scène française actuelle ? Partager la scène avec des groupes comme Khaban à l'espace Jemmapes, c'est un coup de cœur, un service, une obligation, un défi ?

Lulu Borgia : Je dirais pas assez, la chanson reste à mon regret un monde trop individualiste. Sur Paris, c'est compliqué, il n'y a pas vraiment de réseau comme en province, les artistes viennent à Paris pour rencontrer les médias, ça va vite on n'a pas le temps de se croiser. Heureusement, quand on part en tournée, c'est plus facile. Bien sûr on dira aussi qu'il y a des amitiés qui se tissent au bar, je n'y vais peut-être pas assez  !! Pour Khaban , c'est d'abord la rencontre avec Eric du groupe « La Blanche » ils ont le même tourneur. D'ailleurs avec « La Blanche » on va jouer dans une même soirée à l'Empreinte à Savigny (77) au mois de mai. On appartient à une même famille qui mélange le rock et la chanson. Ensuite les liens d'amitié se tisseront ou pas, on laissera faire les cœurs !

Le Petit Dico : On a longtemps balancé des artistes dans les bacs des disquaires, sous prétexte qu'ils correspondaient à une ligne marketing. avant même qu'ils n'aient fait la moindre scène. Depuis quelques années, on assiste à un retournement de situation. Les Benabar, Cali, Camille, Oshen, Aldebert , Grande Sophie, Anaïs, etc. etc, tout comme vous, sont avant tout des purs produits de la scène. Finalement, on a l'impression de retrouver avec bonheur une immense diversité de talents et de moins en moins de produits « formatés ». Votre carrière aurait-elle pu être, à l'opposé, celle d'une enfant de la Téléréalité ? La scène est-elle pour vous le « berceau de la vie » (pour faire écho à Higelin) ?

Lulu Borgia : Je pense vraiment que la création en France ne s'est jamais mieux portée, il existe aujourd'hui une fusion des genres, les passerelles entre différents styles musicaux se tissent. C'est vrai que tous les genres ne sont pas toujours représentés dans les média, mais si le public est actif, s'il fait un effort, s'il refuse de manger tout cru ce qu'on lui impose et bien il trouvera son bonheur. C'est vrai que la scène est le vrai révélateur d'un artiste. Quand le disque est bien meilleur que le spectacle, on peut se poser des questions.

Le Petit Dico : Quelle image avez-vous aujourd'hui de ce que nous offre le Paysage Musical Français ?

Lulu Borgia : Un paysage varié, qu'on aperçoit que si on ouvre la porte. Il existe mais comme l'iceberg ne dévoile qu'une partie. En ce qui concerne la chanson, ou comme on dit  la nouvelle chanson que l'on entend sur les ondes, je la souhaiterai moins nostalgique et aussi qu'elle prenne plus de risque d'un point de vu musical. Mais je la trouve plutôt en bonne santé !!

Le Petit Dico : Internet, le peer-to-peer, la virtualité de la musique…. Ca vous agace ? Ca vous gratouille ? Ca vous chatouille ? Ou c'est un formidable tremplin pour ceux qui n'ont pas la chance de passer à la télé ou dans les radios conventionnelles ?

Lulu Borgia : Je suis absolument pour et comme tout progrès, y'a un revers bien sûr. Ce qui m'intéresse c'est la rapidité de communication, c'est le rapport à l'info immédiatement. Cela me fait penser à ce que j'imagine être le début des radios libres. Evidemment comme tout le monde à droit à la parole, il y a des débordements et tout ce qui est écrit n'est pas forcement exact, mais je le redis tout le monde peut se faire entendre. On dira aussi, trop d'infos, pas d'infos ! Je pense qu'il faut aiguiser ses choix. Le P2P est tout d'abord un problème économique avant d'être un problème artistique. Vu le prix des disques et la multitude des disques qui sortent chaque mois, je ne suis pas étonnée que les jeunes téléchargent, mais vraiment écoutent ils tout ce qu'ils téléchargent  bref ? Auraient-ils acheté le CD de tel artiste téléchargé ? On dira ensuite c'est pas bien, c'est tuer les artistes. Il faut se poser la bonne question : qui se fait de l'argent sur la vente des disques ? Sur les passages radios, et les scènes les artistes touchent leur droit par le biais de la Sacem ! Si l'on me promet de nombreux passages radios et des tournées dignes de ce nom, je veux bien que l'album Tohu-Bohu soit téléchargé. Moi je télécharge et quand ça me plait j'achète l'album, c'est mon éthique. quand je n'aime pas j'efface. Et je peux te dire que depuis j'ai acheté beaucoup plus de CD qu'avant et je découvre plus d'artistes. On est en train d'assister à une mutation ; l'objet disque va–t-il disparaître ? Je ne sais pas, je dirai seulement que le vinyl existe toujours et tant qu'il y aura des artistes et du public dans les salles, je suis prête à suivre toutes les mutations techno-discographiques. Aujourd'hui la licence globale optionnelle me séduit plutôt.

Le Petit Dico : Quels sont les projets de Lulu Borgia pour 2006 ? Un agenda « overbooké » ou quelques temps de repos mérité ?

Lulu Borgia : C'est ça un agenda qui se rempli de jour en jour grâce aussi à Berna notre manager qui fait un travail formidable. En fait tu sais ce qui est fatigant c'est d'attendre, de ne pas faire de concert quand je suis dans l'action je me repose et en plus j'ai un sommeil vraiment réparateur….

Le Petit Dico : Quel regard portez-vous sur la société actuelle, malgré ces « temps médiévaux » ?

Lulu Borgia : Un regard sur une société dont je fais partie et qui ne me ressemble pas. Une société qui à la mémoire courte et qui se cherche des nouveaux dieux et comme elle n'a pas d'imagination, elle reprend les anciens : La religion, le profit et les violences. Heureusement et c'est ce qui me permet de rester optimiste, il y a une humanité underground qui se bat comme elle peut, elle est souvent associative, artistique et passionnée.

Le Petit Dico : Si tu devais mourir demain, en quoi souhaiterais-tu te réincarner ?

Lulu Borgia : En quelqu'un qui pense le contraire de moi pour être une heure dans sa tête mais juste une heure…

Le Petit Dico : Merci mille fois d'avoir voulu répondre à nos questions. Nous vous donnons rendez-vous le 2 février et vous souhaitons bonne chance ("sans poisse") pour la sortie de Tohu Bohu .

Lulu Borgia : Merci à toi Seb de m'avoir invitée sur la toile à partager ce moment, je t'invite quand tu veux à un concert ! A bientôt. LuLu .

SB 2006-2023



Première mis en ligne le 19 mars 2001. Version 8 mise en ligne le 27 octobre 2007 . Dernière MAJ octobre 2023
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