Londres à Paris...
Précédé de deux soeurs aînées
Anne et Catherine (six ans et trois ans avant sa naissance), Bruno Le
Forestier naît à Paris le 10 février 1949,
boulevard Pereire. Sa culture familiale est anglo-saxonne. Son père
est anglais d'origine normande, et si sa mère, Geneviève,
dite Lili, est française, elle n'en est pas moins
très anglaise (elle a vécu en Grande-Bretagne et est traductrice
pour des chaînes anglaises de télévision). Mais
surtout, cette mère est musicienne et inculque à ses enfants
le goût de la musique, et notamment du violon. De musique classique
en école religieuse, le petit Bruno (pas encore Maxime) suit une scolarité
très sobre, mais ne dépasse pas le stade de la classe
de première : il est renvoyé du lycée en 1965.
La révélation Brassens
Mais c'est surtout quand sa mère lui offre un
disque de Brassens
que le jeune homme découvre sa vocation. Dès quinze ans,
il se produit avec sa guitare (exit le violon) sur les marchés
ou au café Chez Louisette à St Ouen. Avec sa soeur Catherine,
en 1965, ils forment un duo Cat et Maxime. Ce duo leur permet d'exercer
réellement leur talent dans les cabarets parisiens en reprenant
des standarts américains ainsi que les premières chansons
de Moustaki avec lequel ils deviennent amis. Puis ils enregistrent
deux 45 tours chez Barclay. C'est leur première expérience
discographique. Et la dernière ensemble. Le duo se sépare
en 1969, service militaire de Maxime oblige. Catherine rejoint Moustaki,
Maxime sa caserne.
Parachutiste hippy
Tout en faisant le militaire, le jeune homme continue
sa passion. Il écrit et la même année, en 1969,
il enregistre ses deux premiers 45 tours solo : Coeur de pierre,
face de lune et Concerto sans frontières. Il écrit
également la musique d'une comédie musicale Oh ! America
!, dans laquelle il fait le comédien avec sa soeur Catherine,
juste après son service militaire. Mais c'est vers les Etats-Unis
que Maxime se tourne en 1970, et plus particulièrement vers...
San Fransisco... Là, il vit comme un bohème, image qui
lui collera longtemps à la peau. A son retour, il enregistre
un autre 45 Tours qui cette fois, bouleversera sa vie et sa carrière
: Mon frère. Son premier album, sorti en 1972, contient
les titres Mon frère, San Fransisco, Parachutiste,...
et est un énorme succès, qui lui permet dès octobre
1972, de réaliser un rêve : chanter en première
partie de son idole, Georges
Brassens, à Bobino.
Une reconnaissance rapide et méritée
Dès ses premiers disques, Le Forestier est reconnu
et apprécié à sa juste valeur. Il est un jeune
homme talentueux, héritier contestataire de Brassens
et de Dylan, dans une France encore sous le choc culturel de mai 68.
Avec sa guitare et ses chansons fleuries, il sillonne la France et y
porte la bonne parole. Il devient une star, mais pas du show-bussiness.
Plutôt un grand frère qu'on vient écouter chanter
(parfois pour une bouchée de pain, comme en 1974, où l'entrée
du spectacle coute seulement 10 Francs !!) plutôt qu'un grande
vedette américaine... Il est l'ami des gens simples et fidèles
aux idées libertaires, et devient leur porte-parole. Ainsi, il
participe avec Ferré,
en 1974, à un concert de soutien aux prisonniers chiliens. Puis
ses tournées mondiales le mènent vers l'URSS.
Un engagement peu engageant...
Mais le public commence vite à bouder ce jeune
barbu aux idées humanistes et révolutionnaires. Victime
de cette image, Maxime essuie un échec commercial en 1976, avec
la sortie de son quatrième album. Il se tourne alors vers des
thèmes et des pays moins en marge, et notamment vers le Canada
et les Etats-Unis pour une tournée internationale riche et variée.
Mais Le Forestier a changé, et le public s'éloigne un
peu de lui au fur et à mesure qu'il s'éloigne de son style
premier. De Brassens,
qu'il chante en public dès 1979, à sa participation à
l'association Partage avec les enfants du Tiers-Monde, Maxime
change, et quitte (volontairement ?) les sentiers battus.
La descente dans l'oubli
Avec les années 80, et ce, malgré les
albums, les tournées internationales, et un talent toujours incontestable,
Maxime Le Forestier n'est plus le jeune chanteur adulé des années
70. Malgré la naissance de son fils Philippe en 1981 qui comble sa vie
personnelle, son public ne comprend plus sa musique. Plutôt que
de perdre de son unicité en se rapprochant du style de ses anciens
albums, le chanteur préfère vivre pleinement sa musique,
au risque de perdre de sa notoriété. Il reste honnête
vis à vis de sa passion et ne concède rien au monde de
l'argent et du succès.
Renaissance
En 1988, Maxime revient au devant de la scène,
avec son titre Né quelque part, aux sonorités
africaines (rapportées sans doute de ses nombreuses tournées
sur le continent africain). Avec le second extrait de son album
du même nom, Ambalaba,
Maxime confirme que son talent ne s'est jamais tarri. Il a simplement
évolué vers de nouveaux sons, vers de nouveaux mots, et le public a mis
presque dix ans à le comprendre. Avec sa nouvelle compagne fabienne, il
a un autre garçon, Arthur (qui deviendra aussi chanteur).
Maxime n'a pas changé, mais c'est son statut
qui a évolué. Il est maintenant un "vieux" chanteur,
un monstre sacré de la chanson. Ce statut lui permet de vivre
sa passion à son rythme, selon ses envies. Ses albums originaux
sont plus espacés, mais ne perdent pas en qualité (Passer ma route en 1995 par exemple). Il s'accorde ainsi quelques plaisirs, plaisir
de paresse, de temps, et retour incessant vers ses premiers amours :
Brassens,
qu'il reprend en studio en 1996 (Douze nouvelles de Brassens)
et en live en 1998. Il participe encore à des oeuvres humanitaires,
Les Enfoirés, Sol En Si,... Son album, L'écho
des étoiles, sorti en 2000, et en partie écrit
avec la complicité de Boris Bergman (parolier de Bashung),
confirme un talent de plus de trente ans. En 2001, Maxime entame une
tournée intime, Sans tambour ni trompette (plutôt guitare),
reprenant ainsi des succès de sa carrière ainsi qu'une grande partie de
son dernier album. Il faut attendre 2008 pour que le chanteur, occupé
par l'univers Brassens, ressorte un album original. Ce sera Restons amants.
Mais la nostalgie est toujours très forte et sa maison de disques
réédite en 2012 l'album Mon frère quarante ans après sa sortie. La
jeune génération rend aussi hommage à Le Forestier dans un album de
reprises.
Sa tournée 2021, après la sortie de Paraître ou ne pas être,
est interrompu par la crise sanitaire mais reprend en 2022. Toutefois,
l'artiste subit un passage à vide lié à des problèmes de santé : les
médecins lui diagnostiquent un cancer de la langue, un comble pour un
chanteur. Il finira par soigner cette maladie et continuer d'écrire et
d'enregistrer.
Plus fort que jamais, Le Forestier reste un homme entier, auteur d'une
oeuvre humaniste, sans aucune concession au "bizenesse". Voilà l'homme
Maxime, à l'image de son maître de toujours : Georges Brassens.
SB 2003-2023
|