De Claude
François, on gardera à jamais l'image d'un artiste intransigeant,
aux costumes de paillettes étincelants et aux chorégraphies
millimétrées. Chef de file du yé-yé, il fut
l'interprète des plus grands succès des années 60
et 70 : Magnolias for ever, Belles belles belles, Alexandrie Alexandra,
Le lundi au soleil, Comme d'habitude, Le téléphone pleure,
ou encore Le Mal aimé. Celui qui fut l'égal d'une
Dalida soulevait
des foules immenses. Pour lui, des milliers de femmes en pleurs mimaient
en France l'hystérie collective que soulevaient les Beatles outre-manche.
En pleine gloire, il disparaît tragiquement mais reste, des décennies après sa mort, plus vivant que jamais.
Un
enfant du soleil.
Parce
que son père est contrôleur du trafic sur le canal de Suez,
Claude naît en Egypte, à Ismaïlia, près du lac
Timsah, le 1er février 1939. Lui et sa grande sœur Josette
suivront leurs parents, Aimé et Lucie, d'origine franco-italienne,
au gré des mutations paternelles. Jeune homme, il vit une enfance
rêvée, jusqu'à la nationalisation du canal en 1956,
par le président Nasser. Expulsés, les François rejoignent
la France et s'installent sur la côte d'Azur, tout d'abord à
Marseille, puis à Monaco et à Nice. Ce changement rapide
de situation pèse sur Aimé et altère sa santé.
Claude, âgé de dix-sept ans, prend les rênes de la
famille et se voit dans l'obligation de trouver très vite un emploi.
Mais cela ne l'empêche pas de développer une passion pour
la musique et la danse : piano, violon et batterie lui permettent de s'évader
d'une vie devenue difficile.
Premier
cachet.
C'est
ainsi que le jeune Claude débute à dix-huit ans aux percussions
dans l'orchestre d'Aimé Borelli puis dans celui de Louis Frazio
et plus tard, d'Olivier Despax. Malgré les remontrances de son
père, Claude s'investit totalement dans cette voie artistique.
Son charisme et sa beauté de jeune éphèbe le font
connaître dans les milieux branchés de la nuit. C'est d'ailleurs
dans une boîte de nuit qu'il rencontre une danseuse anglaise, Janet
Woolcoot, qui deviendra sa femme en 1960 . Il y rencontre également
Sacha Distel et Brigitte Bardot qui lui conseillent, de
concert, de " monter " à Paris. Sans un sou, Claude quitte
le soleil méditerranéen pour la grisaille parisienne en
1961, et découvre une capitale chamboulée par le rock et
les yé-yé.
La
vague des yé-yé.
Profitant
de la vague de succès de la génération Salut
les copains, Claude enregistre un premier 45 tours Nabout
twist, sous le pseudo de Koko, aux éditions Fontana.
Ce twist arabe n'a aucun succès, à une époque
friande de reprises de grands standards américains. Claude
ne se laisse pas déstabiliser par cet échec, et, tout
en abandonnant son nom de scène au profit de son vrai nom,
sort un second 45 tours qui explose au Hit-Parade : Belles belles
belles est le premier d'une longue série de tubes. Cette
reprise des Everly Brothers sort quelques semaines après
la mort de son père. Très affecté par ce décès
(les deux hommes étaient brouillés depuis peu), le
chanteur se lance avec encore plus d'acharnement dans le travail
. Il scelle ainsi une réputation sulfureuse de bourreau du
travail, intransigeant et inébranlable.
Une
prestation scénique incomparable.
Les premiers
titres de Claude François sont ingénieusement des reprises
américaines, très dansantes et à la base rythmique
très simple. Dis-lui, Marche tout droit, ou Si j'avais
un marteau (reprise du succès de Trini Lopez), fonctionnent
parfaitement, mais c'est sur scène qu'il séduit le public.
Ce jeune homme blond à l'apparence asexué est un danseur
hors-pair, au look bon chic bon genre. La gente féminine succombe
rapidement à son charme et participe à ses premiers succès.
Cloclo s'approprie alors un public très jeune qui lui restera fidèle
toute sa vie. En échange, il sacrifie sa vie à sa carrière.
Nombreux sont les jeunes chanteurs qui ont tenté leur chance au
début des années 60. Rares sont ceux qui sont encore présents
aujourd'hui ou qui ont marqué leur époque. Pour y parvenir,
Claude travaille nuit et jour, précipitant la faillite de son couple.
J'y pense et puis j'oublie rappelle cet épisode douloureux
de sa vie privée. Propriétaire désormais de sa somptueuse
demeure de Dannemois, dans l'Essonne, Cloclo devient un véritable
phénomène. 1964 est l'année de son premier Olympia,
salle mythique dans laquelle il retourne dès 1965 pour enregistrer
la célèbre émission Musicorama. Désormais,
il s'accompagne sur scène des fameuses Clodettes, jeunes
femmes superbes qui mettent en valeur, par leur tenue légère
et leur chorégraphie parfaite, le personnage central du chanteur.
Le spectacle de Claude François est un véritable feu d'artifice
scénique dont la gaieté n'a d'égal que la rythmique
envoûtante des chansons.
Le sommet de la gloire.
L'entêtement
avec lequel Claude mène chacune de ses entreprises, fait de lui,
en cette année 1968, un homme comblé. Isabelle, sa nouvelle
compagne, donne naissance à Claude Junior au mois de Juillet (Marc,
son second fils, suivra l'année d'après). Séparé
de sa maison de disques, il crée la maison Flèche
et devient ainsi son propre producteur. Enfin, chacun de ses disque se
vend par centaines de milliers et Cloclo devient, avec l'aide des radios
et des télévisions, la vedette la plus médiatique
de ces années 60. Un titre, particulièrement, sera à
l'origine de cette gloire. Comme d'habitude, créé
en 1968, devient avec les années une des chansons les plus mondialement
interprétées (Presley, Paul Anka, Franck Sinatra ou encore
les Sex Pistols, la chanteront en anglais, et feront de My Way
un air aussi célèbre que l'Imagine de John Lennon).
Chef d'entreprise, Claude ne se contente pas de mener les disques Flèche
avec une main de maître, il produit aussi de jeunes artistes tels
que Chamfort ou Juvet et commercialise un parfum. Il rachète
également le magasine Podium, qui, à l'instar du
célèbre Salut les copains, diffuse dans la presse
écrite, les succès de la chanson auprès de la jeunesse.
Rien ne l'arrête, ni le surmenage qui le guette, (il est victime
d'une syncope sur scène à Marseille), ni un terrible accident
de voiture dont il est victime en 1970.
L'homme
à tout faire.
Entre
les tournées interminables dans le monde entier, son métier
de producteur, sa vie privée et la promotion de ses nouveaux disques
(Chanson populaire, Ca s'en va et ça revient,…) Claude
François trouve le temps de racheter une agence de mannequins et
un magasine érotique Absolu. Son goût immodéré
pour les femmes assoie sa réputation de coureur de jupons. Exigeant,
voire odieux avec ses collaborateurs, frivole, orgueilleux, acharné
dans le travail, de nombreux traits de caractère ternissent sensiblement
l'image du chanteur, si bien qu'il est parfois victime de sa réputation,
comme lorsqu'un fan l'agresse lors d'un concert en 1973. Star immense,
sa vie publique lui coûte très cher : d'un redressement fiscal
à une tentative de meurtre, en passant par l'incendie de sa maison
ou l'explosion d'un cocktail Molotov dans ses bureaux, Claude François
vit sur le fil du rasoir. C'est encore un accident qui lui coûte
la vie le 11 mars 1978. Alors qu'il triomphe sur les ondes avec Alexandrie
Alexandra, il s'électrocute dans la baignoire de son domicile
parisien. La mort précipite l'entrée de Cloclo dans la légende
de la chanson, faisant de sa propriété de Dannemois un Graceland
à la française, véritable lieu de pèlerinage.
Des dizaines de milliers de personnes assistent à ses obsèques
en l'Eglise d'Auteuil à Paris.
Véritable
chef d'entreprise, marquant de son déterminisme et de sa rage de
vaincre le monde de la chanson, Claude François a dirigé
pendant presque vingt ans un empire culturel et musical. Avec Podium ou
les disques Flèche, l'interprète Cloclo savait également
se muer en impitoyable homme d'affaires. Belles belles belles, Le téléphone
pleure, C'est de l'eau c'est du vent, Comme d'habitude, Je viens dîner
ce soir, Je vais à Rio, ou encore Toi et moi contre le monde
entier, font encore danser des millions de fans à travers le
monde. Celui que la mort, tout comme Dalida
quelques années plus tard, en 1987, a porté au firmament
de la chanson populaire, reste associé à jamais à
un art très visuel, pour lequel danse, chant, strass et paillettes
se mêlent merveilleusement.
avril 2002-mai 2023
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BIO EXPRESS
Né
à Ismaïla en Egypte le 1er février 1939-Décédé à Paris le 11 mars 1978.
Petite enfance en Egypte, puis vit sur la côte d'Azur. Son père tombe
malade et Claude doit chercher un emploi à 17 ans. Il développe une
passion pour la musique. Joue dans un orchestre, se marie en 1960 puis
monte à Paris. Premier disque Nabout twist. Décès de son père et sortie de Belles, belles, belles
en 1962. Il achète le moulin de Dannemois. Premier Olympia en 1964.
Début des Clodettes. Nouvelle compagne et naissance de Claude Junior en
1968. Naissance de Marc en 1969. Il crée sa propre maison de disques
Flêche, rachète le magasine Podium. Il est une vedette incontestable.
Il mène tous ses projets de front et s'épuise parfois au travail, ou
prend des risques (malaise sur scène, accident de voiture). Il décède
électrocuté dans sa salle de bain en 1978. Sa mort est un choc pour
tout le pays.
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